Capitale de l'Empire Diabolique, voilà comment Toboë l'appelait.
Voisin du Royaume des Morts, territoire d'un Dieu Obscur et malveillant, l'Empire Diabolique n'était rien de plus que le repère des pires crapules et Démons pouvant encore fouler Heartland.
En arrivant dans les bas quartiers de la cité impériale, il reconnut bien l'odeur malfamée des bordels et des maisons sanguinolents où vices et perversions s'étalaient sans honte et mesure.
Il monta lentement, goûtant à son plaisir sans pour cela perdre de temps. Ses minutes étaient comptées et Devil ne lui pardonnerait certainement pas le moindre retard. Au fur et à mesure qu'il s'approchait du centre de la ville, les quartiers devinrent plus bourgeois. Les cris, la fumée, le sang... toutes les attractions des quartiers populeux se montraient sous un aspect plus raffiné et respectable.
Quelques mètres plus loin, il reconnut la maison de sa maîtresse. Il ne frappa pas à la porte mais l'enfonça d'un bon coup de pied.
« Thierse ! Thierse !!! » s’emporta-t-il.
La maison lui répondit en silence.
« Nom du Diable ! Où est encore passé ce crétin de gobelin ! » pesta-t-il alors qu’il s’apprêtait à fouiller le moindre recoin de la bâtisse.
Au fond d’un couloir sombre, une voix se fit entendre. D’abord timide et craintive, ensuite aux accents vassaux, elle s’approchait de l’endroit où les deux vampires se trouvaient.
« Maître ! » se réjouit-il pour un instant, « Vous êtes revenus. » dit-il avec son timbre mielleux.
« Pourquoi n’es-tu pas venu de suite quand je t’ai appelé, stupide animal ? » demanda-t-il d’un ton haineux.
« Je préparais le repas, votre Seigneurie. Comme tous les jours en vous attendant. » répondit-il sur le même note que tout à l’heure.
Toboë entendit du bruit derrière son larbin et jeta un coup d’œil. Subrepticement, une ogre naine employée comme femme de chambre sortait des cuisines, les habits tenus entre les seins.
« Mhouais… » fit Toboë, dubitatif, « Eh bien retourne à tes fourneaux et prépare-moi un bain chaud de suite. » ajouta-t-il en même temps qu’un coup de pied dans les fesses de son major d’homme.
Ce dernier ne se fit pas prier et fila de suite vers les cuisines où tout un tas de gobelins aussi crasseux que lui étaient affairés à préparer viandes, sauces et autres mets délicats que Toboë n’apprécierait pas de toute façon.
Il gravit les escaliers de marbre de la demeure et se dirigea dans la chambre de Sierra. Toujours inconsciente, il la posa délicatement sur les draps de soie. Il lui déposa un baiser sur le front et ferma la porte derrière lui.
Il prit ensuite la direction de la salle de bain où il se déshabilla alors que les derniers seaux d’eau chaude étaient versés dans le bassin. Quelques secondes plus tard, il trempait dans une eau bouillante et régénératrice.
Il ne se laissa pas aller à la quiétude apparente des lieux, se rappelant la promesse faite au géant l’attendant à l’entrée des Enfers. Une rapide toilette, quelques gouttes de parfum pour évaporer l’odeur de mort qu’il trimballe toujours sur lui et il se para de son nouvel uniforme noir, identique au précédent. Ses gants blancs et son chapeau bien vissé sur la tête, il descendit dans la salle à manger où la nourriture fumait déjà sur les tables. Il s’assit, picora quelques miettes, but une bonne rasade de sang bien frais venu tout droit des abattoirs d’Humains et s’allongea quelques instants dans son fauteuil.
Une dizaine de minutes plus tard, il se releva et prit les plans avec lui.
"Thierse ! Thie… »
« Oui, Maître… » répondit le gobelin avant même que son maître n’ait eu à répéter son nom.
« Prends soin de notre Maîtresse. Elle a besoin de beaucoup d’attention. Fais la boire du sang frais toutes les deux heures. Un peu au début, de plus en plus par la suite. Il ne faudrait pas qu’elle nous fasse une indigestion. Quoi qu’elle dise dans les trois prochains jours, je veux que tu la tiennes au lit. Ligote la s’il le faut. Lorsqu’elle est comme cela, elle ne prête jamais attention à sa santé. De mon côté, je m’absente. Je dois faire mon rapport au Diable de notre Mission et dois repartir de suite après. Bien, je compte sur toi. » conclut-il avant de passer le pas de la porte.
Le petit être insignifiant l’accompagna jusqu’à la sortie et lui fit un petit signe de la main d’encouragement que Toboë ne vit pas.
« C’est ça ! Bon débarras… » susurra-t-il avant de fermer la porte derrière lui et à crier des ordres dans toute la maison.
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